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Emile Bernard, un avant-gardiste réhabilité

L’Orangerie nous fait redécouvrir en 150 œuvres celui que Gauguin considérait comme son maître.

Matthieu Pechberty , Mis à jour le
"Émile Bernard, Autoportrait" (1890), huile sur toile. Collection du musée des beaux-arts de Brest métropole océane
"Émile Bernard, Autoportrait" (1890), huile sur toile. Collection du musée des beaux-arts de Brest métropole océane © Collection du musée des beaux-arts de Brest métropole océane

Une cafetière bleue et des oranges dont les formes se ­réduisent à des lignes élémentaires : cette toile peinte en 1888 témoigne de l'avènement du cloisonnisme, inventé par Émile Bernard et Louis Anquetin, esthétique qui consiste à traiter la surface en larges à-plats de couleur, à cerner les contours des objets et à éliminer la perspective. C'est l'époque où Émile Bernard dit à ses amis artistes qu'il faut désormais voir le style et non l'objet. C'est aussi l'époque où Gauguin, Van Gogh et les nabis se passionnent pour ce peintre (1868-1941). Quelques natures mortes, un champ de blé à perte de vue avec, au premier plan, les figures schématisées de deux femmes travailleuses… Bernard ne peint plus un paysage, mais une toile de fond jaune lisse où s'inscrivent des silhouettes sommaires. Ces tableaux reflètent la synthèse conceptuelle et formelle dans ­laquelle le symbolisme de l'école de Pont-Aven trouve son fondement en 1886-1887.

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Parti dix ans en Égypte

"Entre 1880 et 1890, Émile Bernard a inventé beaucoup de choses. Il est le compagnon de l'avant-garde. Un vrai Protée!", s'enthousiasme Rodolphe Rapetti, un des commissaires de l'exposition. Pourquoi un tel personnage, dont Gauguin disait qu'il était son maître, n'a-t-il pas trouvé sa juste place parmi les grands de la peinture moderne? Cette méconnaissance tient d'abord à sa propre personne. Après une controverse avec Gauguin (encore lui) sur l'invention du symbolisme et leur brouille définitive, il part en Italie, puis, en 1893, en Égypte, où il reste dix ans. "Quand Bernard rentre du Caire, il commence à dénoncer les mouvements avant-gardistes. En quelque sorte, il s'attaque comme un satyre à sa propre progéniture", explique Rodolphe Rapetti.

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Il influence la période bleue chez Picasso

Le peintre adopte une attitude très polémique. Il conteste l'approche schématique et la recherche de primitivisme symboliste. Cette vision se traduit par un retour à une peinture plus classique. "Mais ce serait trop simpliste de le présenter comme un artiste qui passe de l'avant-garde à l'arrière-garde." La preuve avec son tableau hyperréaliste La ­Fumeuse de ­haschisch, peint en 1900 en Égypte et d'une inspiration orientaliste, ou son Autoportrait au vase de fleurs, montrant le peintre en trentenaire sur fond bleu, qui influence directement la période bleue de Picasso, laquelle ne se comprend pas sans un regard précis sur l'œuvre de Bernard.

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Ce dernier voyait en Paul ­Cézanne son "maître d'élection". Il réalisa plusieurs toiles figurant dans l'exposition lui rendant hommage. À la fin de sa vie, sa fascination pour les maîtres anciens n'est pas un simple retour à l'ordre. Il puise chez Michel-Ange, Titien et le Greco selon ses caprices stylistiques. "Il change de style en fonction de ce qu'il trouve. Il illustre parfaitement une idée de la fin de la peinture. Il compose et il transforme." Inclassable, oublié et enfin redécouvert.

* Émile Bernard (1868-1941), musée de l'Orangerie, jusqu'au 5 janvier 2015. 01 44 50 43 00. www.musee-orangerie.fr

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Source: JDD papier

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